Du refus du nucléaire aux mobilisations contre le charbon : les mouvements environnementalistes allemands entre bifurcation et imbrication
Résumé :
Au long de la décennie 1970, alors que l’Allemagne est séparée par le rideau de fer, des mouvements environnementalistes puissants se développent. En Allemagne de l’Ouest le refus de l’implantation des centrales nucléaires réunit agriculteurs, militants pacifistes et écologistes ; à l’Est ce sont les enjeux de qualité de vie face à aux pollutions industrielles qui sont déterminants. Le parti des Verts allemands (Grünen) créé en 1980, est issu de ces mouvements. Il a installé sa légitimité institutionnelle en confortant les mouvements environnementalistes par son action au pouvoir dans les Länder, à l’échelle fédérale ensuite. Autour d’épisodes emblématiques comme le renoncement à construire la centrale de Wyhl, ou l’action des rebelles de l’électricité de Schönau qui préfigurait la transition énergétique citoyenne (Bürgerenergiewende), les enjeux énergétiques sont devenus un sujet de débat démocratique. En 2023, la sortie du charbon, et particulièrement du lignite, se pose désormais avec acuité alors qu’un tiers de l’électricité allemande en est issue. De nouveaux mouvements, comme Ende Gelände, nourris par les mobilisations climatiques de la jeunesse dans le monde et en Europe, occupent mines et villages, dénonçant la mollesse des gouvernements et exigeant des engagements immédiats. Alors que les Grünen sont partie prenante du gouvernement depuis 2021, et que la guerre en Ukraine retarde la transition vers une économie décarbonée, ces mouvements déterminés, organisés et médiatiques annoncent une nouvelle étape de l’écologie politique allemande.
Abstract : From nuclear refusal to mobilizations against coal : the movements German environmentalists between bifurcation and imbrication
During the 1970s, when Germany was separated by the Iron Curtain, powerful environmental movements developed. In West Germany the refusal of the implantation of nuclear power plants brings together farmers, pacifist activists and ecologists ; in the East it is the quality of life issues facing industrial pollution that are decisive. The party of the German Greens (Grünen) created in 1980, comes from these movements. It established its institutional legitimacy by strengthening the environmental movements in its action in power in the Länder, then at the federal level. Around emblematic episodes such as the renunciation to build the Wyhl power plant, or the action of the Schönau electricity rebels who foreshadow the citizen energy transition (Bürgerenergiewende), energy issues have become a subject of democratic debate. In 2023, the exit of coal, and particularly lignite, is now acute, while a third of German electricity comes from it. New movements, such as Ende Gelände, fuelled by the climate mobilizations of youth around the world and in Europe, occupy mines and villages, denouncing the weakness of governments and demanding immediate commitments. While the Grünen have been part of the government since 2021, and the war in Ukraine is delaying the transition to a decarbonised economy, these determined, organized and media movements are heralding a new stage in German political ecology.
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